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Le VIH/Sida chez les usagers de drogues (actualisation novembre 2015)

mardi 17 novembre 2015, par Alice CLOTAGATIDE

VIH/Sida et usagers de drogues… quels liens ?

Les usagers de drogues constituent une population particulièrement à risque vis-à-vis des infections et tout particulièrement du VIH (virus de l’immunodéficience humaine) dont la prévalence est estimée à 28 fois plus élevée parmi les personnes qui s’injectent des drogues.

Selon l’UNODC, environ 1,65 million d’usagers des drogues injectables vivent avec le VIH en 2013.

D’après l’ONUSIDA, « ces épidémies sont alimentées par l’homophobie, la stigmatisation et la discrimination, et aggravées par des lois punitives. »


 

Sommaire



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1/ Qu’est-ce que le VIH ? Le Sida ?

Le VIH est le Virus de l’Immunodéficience Humaine. L’infection par le VIH est une infection qui se transmet d’une personne à l’autre. Quand le VIH est entré dans l’organisme, on dit qu’on est séropositif.

Le VIH s’installe vite dans l’organisme, et se reproduit. Il attaque les défenses immunitaires qui servent à nous protéger d’autres maladies.
 
Lorsque le VIH a détérioré le système immunitaire d’une personne, des maladies se développent alors : ce sont les maladies opportunistes. C’est à ce moment-là qu’on est malade du sida ou syndrome d’immunodéficience acquise.
(Sources : Inpes et ONUSIDA)
 
 
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2/ Quels sont les modes de contamination ?

Le VIH/sida peut se transmettre selon trois modes :

  • lors de rapports sexuels non protégés,
  • de la mère séropositive à l’enfant pendant la grossesse, lors de l’accouchement et de l’allaitement,
  • quand on partage certains matériels liés à l’usage de drogues,
    • Partage ou réutilisation de matériels d’injection.
      Le risque d’être contaminé(e) par le VIH est important quand on partage ou on réutilise du matériel d’injection ayant déjà servi (seringue, aiguille, récipient, filtre, eau, tampons …).
      Du sang contaminé peut être resté sur le matériel, et le VIH peut alors entrer dans l’organisme.
    • Partage ou réutilisation de la paille de « sniff » ou de la pipe à crack.
      Le risque d’être contaminé(e) par le VIH est possible en présence de plaies (dans le nez ou sur les lèvres) ou de sang sur le matériel.
Selon le rapport mondial sur les drogues 2015 de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), les usagers de drogues injectables ont un taux de mortalité 15 fois plus élevé que la population générale, en lien avec les nombreux facteurs de risque, tels que la transmission de maladies infectieuses (comme le VIH et l’hépatite C) et les cas de surdose de drogue.

Par ailleurs, « les consommateurs d’autres types de drogues sont souvent très exposés au risque d’infection à VIH en conséquence d’un comportement sexuel à risque élevé et de la pratique du commerce du sexe associée à la consommation de drogues. » (p.60)
Source : ONUSIDA. 2011/2015. Stratégie – Objectif ZERO

 
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3/ Données nationales et locales sur VIH/Sida chez les usagers de drogues par voie intraveineuse

Données nationales

Le nombre d’usagers de drogues (UD) découvrant leur séropositivité VIH est de 1% de l’ensemble des diagnostics en 2013. La majorité d’entre eux sont des hommes (90%).

« L’étude Coquelicot 2011 [1] confirme les constats observés lors de la précédente édition en 2004. La population des UD est majoritairement masculine (79% d’hommes). Les UD fréquentant les dispositifs spécialisés sont très fortement marqués par la précarité sociale, un usager sur 5 vit dans un squat ou dans la rue, et 79% des usagers ne travaillent pas au moment de l’enquête. Les produits illicites les plus couramment consommés restent des stimulants et tout particulièrement le crack, puis la cocaïne.
La pratique d’injection active, au cours du dernier mois, concerne plus d’un tiers des UD (36%), et de manière plus importante ceux âgés de moins de 30 ans (53% d’entre eux).
La proportion d’UD séropositifs pour le VIH est stable entre 2004 et 2011, autour de 10%. En revanche, la séroprévalence du VHC est en baisse entre 2004 et 2011 (de 60% à 44%), de façon encore plus marquée chez les jeunes UD (de 28% à 9%).

Malgré ce résultat encourageant, l’importance des pratiques d’injection chez les plus jeunes UD et la persistance de pratiques à risque nécessitent de rester vigilants sur la prévention du VHC et du VIH dans cette population et de proposer de nouveaux modes d’intervention en matière de réduction des risques. »

Source : Invs - article « usagers de drogues »

En 2013, environ 1150 cas de sida ont été diagnostiqués, dont 92 liés à l’usage de drogues par voie injectable (UDVI), soit 8 % de l’ensemble des nouveaux cas de sida (contre 27 % en 1995).

Source : Évolution du nombre de nouveaux cas de sida liés à l’usage de drogues par voie injectable depuis 1995. Séries statistiques. OFDT. 2013 (PDF - 153.1 ko)

La même année, 92 décès de personnes atteintes de sida sont survenus parmi ces usagers. « L’introduction des traitements par trithérapie en 1996 a permis de diviser par quatre le nombre de décès par sida chez les UDVI entre 1994 et 1997. Depuis, le nombre de décès a poursuivi sa baisse mais à un rythme plus lent, parallèlement à une nette diminution de la prévalence du VIH chez les UDVI. (…) Depuis le début de l’épidémie, le quart des décès au stade sida est survenu parmi les UDVI.  »

Source : Évolution du nombre de décès au stade sida chez les usagers de drogues par voie injectable depuis 1998. OFDT. 2013 (PDF - 153.2 ko)

Données dans les DOM

La contamination par usage de drogues injectables est plus fréquente à La Réunion (6 %) et en Martinique (3 %) que dans les deux autres départements d’Outre-Mer (moins de 1 %), ces derniers étant pourtant les plus touchés par l’infection au VIH/sida en France.

Source : Evaluation du plan national de lutte contre le VIH-SIDA et les IST 2010-2014 en direction des populations d’outre-mer – Ministère des Outre Mer

Le 14e colloque VIH et Hépatites de l’Océan Indien, organisé en Octobre 2015 aux Seychelles, sur le thème « S’unir pour combler les écarts et arriver à zéro nouvelle infection, zéro nouveau décès et zéro discrimination » a traité la problématique des drogues injectables, du fait du nombre croissant d’usagers dans certaines îles et des risques de contaminations élevés au VIH et aux hépatites sans réduction des risques et programmes d’échanges de seringues.

Le Docteur David METE, addictologue au CHU Félix Guyon, à La Réunion, y a fait une allocution sur le thème de la “Prévention et prise en charge de l’usage de drogue intraveineuse”.

Il y souligne la morbi-mortalité très élevée chez les injecteurs de drogues. Cette pratique est en moyenne à l’origine de 5 à 10% des cas de VIH, voire jusqu’à 40% dans certains pays (notamment en Tanzanie et à Maurice).

Voir l’article sur le colloque et le diaporama du Docteur METE

Voir également :
Données épidémiologiques COREVIH La Réunion/Mayotte, juin 2015

 
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4/ Interactions potentiellement dangereuses entre traitement du VIH et usage de drogues

« Lorsqu’un médicament est pris en combinaison avec un autre produit, licite ou illicite, leur interaction peut potentiellement réduire ou accentuer l’effet de l’un ou de l’autre. C’est le cas tant pour les drogues licites (médicaments) prescrits que pour les produits illicites, comme les drogues récréatives. »

Il existe potentiellement des interactions dangereuses entre les antirétroviraux à action directe contre le VIH et certaines drogues récréatives.

« Les praticiens doivent être vigilants aux épisodes et pratiques de consommation de drogues récréatives chez leurs patients afin de les informer sur les risques de toxicité, des effets secondaires liés aux produits et de potentielles interactions pouvant mener à une surdose involontaire et fatale » concluent les auteurs de l’article.
« Malgré cela, de nombreux patients ne modifieront pas leur consommation, par conséquent un switch vers une autre combinaison antirétrovirale présentant moins de risque d’interaction doit être envisagée avec le patient ».

Source : Article « Traitements contre le VIH et drogues récréatives : interactions potentiellement dangereuses (methamphétamine, méphédrone, MDMA ou kétamine) ». Site vih.org

 
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5/ Criminalisation des usagers de drogues

« « La criminalisation des personnes qui consomment des drogues alimente l’épidémie de VIH, » a déclaré M. SIDIBE (Directeur exécutif de l’ONUSIDA). « Dans la riposte au sida, laisser de côté les personnes qui consomment des drogues, alors que nous savons ce qui fonctionne, est une injustice.

L’investissement dans la réduction des risques est un facteur essentiel dans la politique efficace en matière de drogues ; non seulement il sauve des vies, mais il est également rentable. Tout le monde a le droit à la santé ».

Les stratégies de réduction des risques, comme le traitement substitutif aux opiacés (TSO) et les programmes aiguilles et seringues, ont fait leurs preuves dans plusieurs pays dont l’Australie, les Pays-Bas, le Portugal et la Suisse. Toutefois, moins d’un tiers des pays fournissent des programmes aiguilles et seringues pour les personnes qui consomment des drogues injectables.
Les personnes qui consomment des drogues injectables sont 28 fois plus susceptibles d’être infectées par le VIH que la population générale. Seuls 14% des personnes qui consomment des drogues injectables vivant avec le VIH ont accès aux médicaments antirétroviraux. »

Source : Problème mondial de la drogue : vers une approche centrée sur les personnes. ONUSIDA. 22 octobre 2015


 
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6/ Usage de drogues et réduction des risques

« La réduction des risques (RDR) est une politique privilégiant des stratégies de soin et de prévention visant à limiter les risques sanitaires (infections notamment par le virus de l’immunodéficience humaine ou VIH et par les virus des hépatites B et C, etc.) et sociaux (exclusions, précarité, etc.) liés à l’usage de psychotropes et, particulièrement, des drogues illicites. »

Source : Dictionnaire des drogues et des toxicomanies, Richard D, Senon JL et Valleur M, 2004

Cette politiques de RDR a été mise en place en France à la fin des années 1980 pour réduire l’épidémie de VIH/sida chez les UD. Il s’agit d’une politique pragmatique qui rompt avec la volonté d’éradication des drogues et hiérarchise les risques auxquels les usagers sont confrontés, se préserver vis-à-vis du risque de transmission du VIH et des hépatites devenant prioritaire.

« La Résolution E/2009/L.23 du Conseil économique et social évoque la fourniture d’un ensemble complet de services aux consommateurs de drogues injectables, dont les programmes de réduction des risques en rapport avec le VIH, à savoir :

  • des programmes d’aiguilles et de seringues (mise en vente libre en pharmacie en 1987 et programmes d’échange de seringues en 1992) ;
  • des traitements de substitution aux opiacés et autres traitements de la dépendance ; (en 1995 pour la buprénorphine haut dosage et en 1996 pour la méthadone) ;
  • le dépistage du VIH et conseil ;
  • le traitement antirétroviral ;
  • la prévention et le traitement des infections sexuellement transmissibles ;
  • des programmes de distribution de préservatifs pour les consommateurs de drogues injectables et leurs partenaires sexuels ;
  • une information, une éducation et une communication ciblées sur les consommateurs de drogues injectables et leurs partenaires sexuels ;
  • la vaccination, le diagnostic et le traitement de l’hépatite virale ;
  • et la prévention, le diagnostic et le traitement de la tuberculose.
Sources :
Source : Rapport KABP 2011. Les connaissances, attitudes, croyances et comportements face au VIH/sida en Ile-de-France en 2010 - Situation en 2010 et 18 ans d’évolution (PDF - 2.2 Mo)

Cette politique a été légalisée par la loi du 13 août 2004. Une centaine de CAARUD ont été créés depuis 2005.

Au niveau international, la déclaration de Vienne de 2010 a clairement élevé la RDR comme solution face à des politiques répressives dont les impacts sont très limités sur le plan sanitaire et social.
Aujourd’hui, les défis sont : la précarité et l’hépatite C. Face à cela, la solution est bel et bien l’approfondissement de la politique de RDR et cela passe notamment par l’expérimentation de salles de consommation à moindre risque. » (p.73)

« L’intérêt est la sécurité sanitaire : la salle de consommation permet de réduire principalement les risques d’infection au VIH ou VHC, en fournissant un lieu propre et sécurisé, des seringues, sous la surveillance de personnel médical pour prévenir notamment toute overdose. La SCMR permet à l’usager de ne pas s’injecter dans la rue. Ce faisant, ce type de structure a un intérêt en termes de santé publique puisqu’elle permet une prévention de la contamination au VHC et au VIH mais également en termes de sécurité publique (notamment quant à l’absence de matériel d’injection sur la voie publique). » (p.74)

Source : Guide API 2015-2016. Actes des Etats Généraux des Elus Locaux Contre le Sida - ELCS

Une autre mesure de réduction des risques existe et fait ses preuves : l’éducation par les pairs.
Il s’agit de sessions d’éducation délivrées par des pairs aux UDVI dans le but de réduire significativement les pratiques à risque de transmission du VIH et du VHC.

En savoir plus : VIH et VHC chez les usagers de drogues : l’éducation par les pairs réduit le risque infectieux. ANRS, AIDES, Médecins du Monde et INSERM. Juillet 2014

Voir aussi sur le sujet : RDR Drogues - Etude AERLI. L’accompagnement à l’injection prouve son efficacité dans la réduction des risques de transmission VIH et VHC

"L’ensemble des données de l’enquête Coquelicot incite à poursuivre l’effort en matière de réduction des risques en France afin de soutenir son impact sur la diminution de l’hépatite C, comme cela a pu être observé dans d’autres pays européens.
Une attention particulière doit être accordée aux jeunes injecteurs, qui ont des pratiques d’injection plus fréquentes que les UD plus âgés, sans toujours bien connaître les techniques de réduction des risques, ce qui les expose tout particulièrement au risque de transmission de l’hépatite C et du VIH.
De nouveaux modes d’intervention complémentaires tels que la prévention du passage à l’injection, une éducation aux risques liés à l’injection, et des salles de consommation médicalisées pourraient ainsi constituer des alternatives de santé publique à expérimenter en France."

Source : Estimation de la séroprévalence du VIH et de l’hépatite C chez les usagers de drogues en France - Premiers résultats de l’enquête ANRS-Coquelicot 2011

 
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7/ Lutte contre la pandémie de VIH/sida

ONUSIDA est un programme de l’ONU destiné à coordonner l’action des différentes agences spécialisées de l’ONU pour lutter contre la pandémie de VIH / sida.

« La Stratégie 2011/2015 de l’ONUSIDA vise à favoriser les progrès mondiaux dans la réalisation des objectifs fixés par les pays en faveur de l’accès universel à la prévention, aux traitements, aux soins et au soutien au VIH, à stopper et renverser la propagation du VIH, et à contribuer à l’accomplissement des Objectifs du Millénaire pour le développement à l’horizon 2015. »

Parmi les objectifs de l’ONUSIDA, à l’horizon 2015 :
  • La « Prévention de toutes les nouvelles infections à VIH parmi les personnes qui consomment des drogues », pour parvenir à la vision « zéro nouvelle infection »
  • « Réduire de moitié le nombre de pays ayant des lois et pratiques punitives concernant la transmission du VIH, le commerce du sexe, la consommation de drogues ou l’homosexualité, qui entravent l’efficacité des ripostes », pour parvenir à la vision « zéro discrimination ».

« Les travaux de la Commission mondiale sur le VIH et le droit peuvent permettre de lancer des initiatives visant à mettre le droit au service d’une riposte au VIH qui soit efficace et fondée sur les droits de l’homme » (p.16)

Source : ONUSIDA 2011/2015 Stratégie – Objectif ZERO

Accélérer la riposte : mettre fin à l’épidémie de sida d’ici à 2030

« Le monde est en train d’adopter une stratégie d’accélération de la riposte pour mettre fin à l’épidémie de sida d’ici à 2030. »

« La couverture du traitement de substitution aux opiacés pour les consommateurs de drogues injectables et des programmes de prévention dans les prisons doit aussi être largement intensifiée. »

Source : ONUSIDA. 2014. « Accélérer la riposte. Mettre fin à l’épidémie du sida d’ici à 2030. »

 
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8/ Bibliographie et liens utiles


Dossier de la PEIDD sur « Le VIH/Sida dans le monde, en France hexagonale et dans les DOM. Novembre 2015 »

En savoir plus sur la réduction des risques en France :

En savoir plus sur le VIH/sida dans les DOM :

Notes
[1] Etude Coquelicot 2011 sur la santé des usagers de drogues et leurs besoins en matière de réduction des risques, étude coordonnée par l’InVS et co-financée par l’ANRS (BEH 39-40 ;2013)